La haie et la Politique Agricole Commune (PAC)
Depuis 2014, le paiement des aides de la Politique Agricole Commune (PAC) est conditionné au respect de bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE).
L'une de ces BCAE intéresse directement la protection des haies et constitue par conséquent un outil qui peut être mobilisé afin de s'assurer de leur maintien et de dénoncer leur détérioration, le cas échéant via des demandes de replantation.
L’ancienne BCAE n°7 fixait des conditions relatives au maintien des particularités topographiques, comprenant les éléments boisés comme la haie.
Le plan stratégique national (PSN) de la PAC 2023-2027 est entré en vigueur au 1er janvier 2023. Ces conditions sont maintenues dans la nouvelle BCAE n°8 (ancienne BCAE n°7 + évolutions), intitulée « Part minimale de la superficie agricole consacrée à des zones ou des éléments non productifs – Maintien des éléments topographiques du paysage – Interdiction de couper les haies et les arbres pendant la saison de nidification » (voir PSN pages 312 à 315, téléchargeable sur le site du ministère en charge de l’agriculture).
NB : Cette fiche renseigne sur les conditions agricoles et environnementales pour la programmation des aides débutant en 2023 et relatives à la préservation des haies. Elle est rédigée dans une phase de transition et sous réserve des arrêtés ministériels restant à venir.
Des exigences relatives au maintien et à la période de taille et de coupe des haies
Deux règles liées à la conditionnalité des aides de la PAC intéressent directement la protection des haies. Déjà prévue dans le cadre des anciennes BCAE 7, elles sont maintenues et adaptées par les nouvelles dispositions du II et III de l’article D. 614-52 du code rural et de la pêche maritime, à savoir :
1) L’obligation de maintien de particularités topographiques.
Cette règle impose en pratique l'interdiction de destruction (arrachage) des haies.
Tout comme pour les anciennes dispositions, un arrêté ministériel doit fixer « la liste de ces particularités topographiques, leurs caractéristiques ainsi que les conditions dans lesquelles leur maintien est assuré en cas de déplacement, de destruction ou de remplacement ».
Selon le PSN 2023-2027 / BCAE n°8, la haie fait toujours partie de ces éléments topographiques. La haie est définie « comme une unité linéaire de végétation ligneuse, d’une largeur inférieure ou égale à vingt mètres, implantée à plat, sur talus ou sur creux ».
L’obligation de maintien est fixée pour les haies de moins de 10 mètres de large.
(voir PSN pages 312 à 315, téléchargeable sur le site du ministère en charge de l’agriculture).
Bon à savoir
L’obligation de maintien concerne également les bosquets de 50 ares ou moins (un bosquet est défini dans le PSN 2023-2027 comme un « élément non linéaire d’arbres ou d’arbustes dont les couronnes se chevauchent pour former un couvert de superficie de 50 ares au plus » (voir PSN pages 312 à 315, téléchargeable sur le site du ministère en charge de l’agriculture).2) L’interdiction de tailler et couper les arbres pendant la période de nidification et de reproduction des oiseaux
.Ces nouvelles dispositions entendent s’adapter au cycle biologique des oiseaux en fixant la période d’interdiction du 16 mars au 15 août au lieu du 1er avril au 31 juillet.
Avantages de ces conditionnalités des aides
Ces conditions incitent à la préservation des haies sur les parcelles agricoles en contrepartie des aides.
L’interdiction de taille et de coupe en période de nidification présente l’intérêt d’être explicite et de prendre en compte l’ensemble de l’avifaune, y compris les espèces non protégées.
Le PSN 2023-2027 autorise toujours les coupes rases ou dites à blanc, lesquelles peuvent pourtant s'avérer nuisibles au maintien de la haie. C'est pourquoi il prévoit un encadrement pour limiter les dérives. Une coupe à blanc mal réalisée peut conduire à la destruction de la haie. Des coupes à blanc successives dégradent et altèrent la haie concernée.
Le PSN 2023-2027 indique que « des visites sur place peuvent être diligentées l’année suivant la coupe pour s’assurer que des repousses sont bien présentes et que l’agriculteur laisse la haie se développer sans procéder plusieurs années de suite à de telles coupes » (voir PSN pages 312 à 315, téléchargeable sur le site du ministère en charge de l’agriculture).
Limites de ces exigences environnementales relatives aux haies
Sur les éléments concernés par les conditions
Elles ne concernent que les agriculteurs bénéficiaires des aides de la PAC soumises à la conditionnalité (Voir article D. 614-44 du code rural et de la pêche maritime).
Sur le champ d’application de l’interdiction de destruction
L’interdiction ne concerne que la destruction, à savoir au sens de ces conditionnalités des aides, la suppression définitive de la haie, ce qui autorise les coupes rases ou à blanc (sous réserve de l'encadrement précisé précédemment).
Des "destructions" (suppression sans replantation), "déplacements" (suppression moyennant replantation sur l'exploitation) et "remplacements" (suppression moyennant replantation au même endroit) sont admis sous conditions. L’agriculteur doit préalablement déclarer l’opération à l’administration compétente.
L’arrêté ministériel du 24 avril 2015 modifié relatif aux règles de bonnes conditions agricoles et environnementales précisait pour l’application de l’ancienne BCAE n°7 les cas où des destructions pouvaient être autorisées (création d’un accès, agrandissement d’un bâtiment, gestion sanitaire de la haie, défense de la forêt contre les incendies, réhabilitation d’un fossé, travaux déclarés d’utilité publique, opération d’aménagement foncier).
Pour la programmation débutant en 2023, l’arrêté ministériel reste à venir. Le PSN 2023-2027 confirme la possibilité de déroger à l’interdiction pour des cas spécifiques de destruction, déplacement et remplacement en maintenant la procédure de déclaration préalable. Les conditions restent à préciser et ne peuvent donc pas encore être décrites ici.
L’arrêté ministériel du 24 avril 2015 modifié précité permettait sans condition particulière un déplacement des haies pour chaque campagne dans la limite de 2 % du linéaire ou 5 mètres. Au delà de ces cas, le déplacement n’était permis que pour certains motifs (cas de destructions autorisées, déplacement pour un meilleur emplacement environnemental, transfert de parcelles entre deux exploitations) devant être présentés à l'administration.
Ce système permettait ainsi tous les ans de supprimer 2 % du linéaire sans motif à condition de replanter. Cette replantation n’était accompagnée d’aucune exigence d’équivalence des fonctionnalités. N'étaient exigées qu'une replantation au sein de l’exploitation et une longueur au moins équivalente.
Le PSN 2023-2027 ne précise pas les principes de ces déplacements. Nous ne pouvons à ce jour préciser si un pourcentage du linéaire pourra toujours être déplacé sans contrôle préalable et sans conditions d’équivalence des fonctionnalités pour un gain équivalent ou supérieur pour l’environnement, ou si sur ce point les conditions seront renforcées.
Le remplacement était permis après déclaration préalable auprès de l’administration dans le cas d’éléments morts ou de changement d’espèces d’arbres, arbustes.
Sur les sanctions en cas de non-respect des conditions
Les sanctions sont administratives et portent sur la possibilité donnée à l’administration de réduire les paiements des aides soumis à la conditionnalité (Voir les dispositions des articles D. 614-55 et suivants du code rural et de la pêche maritime). De l'ordre de quelques pourcents pour une première infraction, le montant de la réduction d'aide appliqué augmente en cas de récidive.
Le constat d'une destruction non autorisée peut par ailleurs conduire l'autorité administrative à imposer une replantation, sur place ou à proximité.
Il n’y a pas de sanctions pénales prévues par les textes. En revanche, l'irrespect de la BCAE 8 peut être cumulé avec des infractions pénales prévues au titre d'autres réglementations, par exemple la destruction d'habitats d'espèces protégées ou la violation du plan local d'urbanisme. Un cumul de sanctions administratives et pénales est donc possible selon les cas.
Sur les contrôles des services de la DDT/DDTM
Les objectifs de contrôle fixés par les textes portent sur un minima peu ambitieux de 1 % des bénéficiaires par campagne de contrôle (Voir article D. 614-55 du code rural et de la pêche maritime).
Les plans de contrôle se déploient dans le temps avec des moyens humains limités. Les résultats ne sont pas immédiats.
Que faire en cas d’atteinte à une haie sous condition BCAE n°8 pour la programmation des aides débutant en 2023
Vérifier :
- l’opération réalisée : destruction, coupe rase, entretien
- la fréquence en cas de coupe rase : première coupe ou coupe répétée
- la période en cas de taille et coupe d’arbre (interdiction entre le 16 mars et les 15 août)
Signaler
Aux administrations compétentes
- Signaler à la DDT/DDTM les destructions de haies des parcelles agricoles. Cela peut faciliter les contrôles administratifs réalisés par les services, par exemple en orientant des possibilités de contrôle sur place ou la détermination des priorités de leur plan de contrôle. Au vu du déploiement géographique progressif des contrôles, un signalement fait à l'administration peut prendre plusieurs années avant d'être examiné, ce qui ne veut pas dire qu'il ne le sera pas.
Si la tolérance des 2 % ou similaire est maintenue à compter de 2023, ces signalements permettent d’assurer un suivi du taux par an et des rappels par l’administration quant à l’obligation de replanter et un contrôle.
- Signaler également à la DDT/DDTM les coupes rases pour suivi des nouvelles conditions prévues par les PSN 2023-2027.
- Doubler d’un signalement au maire de la commune en cas de haies protégées au titre du PLU [PLUI] (Coordonnées mairies) et des services de l’OFB en cas d’atteinte à un habitat d’espèces protégées ou à une espèce protégée (Coordonnées OFB)
Pensez à leur fournir les éléments d’information suffisants pour une prise en compte du signalement (voir la fiche destruction).
Aux associations
- Dans tous les cas, signalez les faits auprès du réseau France Nature Environnement sur Sentinelles de la Nature de votre région en cliquant sur la rubrique espace signalement
- Informez le cas échéant l'association environnementale locale du territoire concerné.
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